Côte d’Ivoire : à Gagnoa on ne va pas à l’école

Les années passent et se ressemblent à Gagnoa. En dépit du changement de régime et de la volonté du ministère de l’Education de sortir des sentiers battus. Comprenez; se débarrasser des vieilles pratiques comme la violence et l’incivisme qui ont plongé le système éducatif ivoirien dans un état comateux.
Hélas, les habitudes n’ont pas fondamentalement changé au niveau des mœurs scolaires à Gagnoa. Le règne de l’enfant roi ou de l’élève roi prend un relief fort particulier dans cette ville historiquement et politiquement frondeuse. Tout est prétexte pour les élèves à se donner des jours de congés indus ou à défaire le calendrier national des congés scolaires selon leur caprice du moment.
Dernier exemple, ce lundi 10 novembre 2014, l’atmosphère est lourde au sein du lycée moderne 3 de Gagnoa, motif : le décès d’un enseignant. Après la montée du drapeau, les apprenants se regroupent et décident sur le moment de l’arrêt des cours jusqu’au mercredi 13 novembre et selon une tendance jusqu’au 15 novembre. Dans la foulée, le proviseur convoque une réunion avec le personnel enseignant et d’encadrement durant laquelle il décide avec l’accord du DREN de marquer le deuil en libérant les élèves pour la seule journée du lundi 10 novembre.
Surprise (pas vraiment) le mardi 11 novembre, la cour du lycée moderne 3 est désespérément vide, l’arrêt des cours lié au deuil décrété par les élèves se poursuit toujours selon leur convenance. Cette attitude surréaliste me fait penser à la remarque d’un collègue : « Au lycée moderne 3 lorsque les cours sont perturbés en début de semaine, les cours ne reprennent qu’en début de semaine prochaine », drôle de fatalité pour une drôle d’école dans cette partie combien sensible de la Côte d’Ivoire.
Triste que de voir instrumentaliser le décès d’un enseignant par les élèves à des fins d’arrêt de cours prolongés. Cette culture du mépris des règles et de l’incivisme qui consiste à laisser les apprenants faire la pluie et le beau temps semble être nourrie aussi bien par le laxisme coupable des chefs d’établissement que de la direction régionale de l’éducation nationale. En attendant la prise de mesures énergiques pour freiner ce fléau, le règne de l’apprenant roi à Gagnoa semble avoir de beaux jours devant lui avec pour credo : « On ne va pas à l’école à Gagnoa et ça ne va pas à quelque part ».
Commentaires